Il doit y avoir quelque chose qui m'échappe !!
Dans
"Récits et souvenirs de famille, S.A.R. Madame, duchesse de Berry, et ses amis, 1832" par le Vte Sioc'han de Kersabiec, est citée à la page 13 et 14 du chapitre 2, la lettre qui suit, attribuée à Jean-Baptiste Sioc'han de Saint-Jouan et destinée à sa mère:
Etampes, à 12 lieues de Paris, 7 septembre.
"Encore un mot, ma chère Maman. Depuis dix jours, nous avons plusieurs fois changé de destinée. L'autre jour, nous partions pour Saumur, hier pour Paris, et demain pour Versailles. Voici, ce me semble, où nous devons séjourner sous la garde de Dieu, et celle de messieurs de la troupe nationale parisienne. Je ferai mon possible pour vous donner de mes nouvelles. Veuillez me rappeler au souvenir de ma famille et surtout des personnes qui vous entourent. Je n'ai aucun mérite à les aimer, je ne fais que céder à une impulsion de mon coeur, mais je les prie de songer quelquefois à celui qui est tout à vous et à elles .
J'ai remis à quelqu'un de confiance une lettre qu'il vous fera passer, s'il y a lieu; je ne l'ai point signée mais je vous la recommande. Ma tranquillité serait troublée si je pouvais croire qu'il en fût autrement. Il me coûte de vous quitter, mais enfin, il le faut."
L'auteur de
"Récits et souvenirs de famille, S.A.R. Madame, duchesse de Berry, et ses amis, 1832", le Vte Sioc'han de Kersabiec, ajoute que cette lettre n'arrive jamais à son destinataire mais fût envoyée à Paris où elle a été retrouvée par M. Mortimer-Ternaux qui l'a publie dans son
"Histoire de la Terreur"
Effectivement, à la page 575 d'
"Histoire de la Terreur", on retrouve mot pour mot cette même lettre, citée parmi plusieurs autres lettres des massacrés de Versailles.
Il est noté que cette lettre est destinée:
"à Madame de Saint-Jouan, à Saint-Malo, Ille-et-Vilaine". En revanche Mortimer-Ternaux n'attribue pas cette lettre à Jean-Baptiste Siochan mais semble envisager qu'elle a été écrite par M. de Kersauson. Il indique en bas de page:
"Il n'y avait pas d'officier du nom de Saint-Jouan parmi les prisonniers. Le seul nom breton est celui de Kersauson." .
Effectivement, dans la liste des prisonniers, Jean-Baptiste devait apparaitre sous le nom de Sioc'han ou Siochan... et sans doute pas de Saint-Jouan..
Ainsi en rédigeant
"Récits et souvenir de famille [...]" le Vte de Kersabiec n'a fait qu'attribuer, sans doute à raison, à Jean-Baptiste Siochan la lettre retrouvée à Paris par Mortimer-Ternaux (que celui-ci pensait être de la main de Kersauson, mais que le terme
"ma chère Maman" a dû empêcher de la lui attribuer définitivement !)
Dans les deux ouvrages il s'agit, mot pour mot de la même lettre.
Mais alors d'où vient la lettre que vous citez dans votre message du 15/02/2012 de ce même fil :
Étampes, le 6 septembre.
Encore une dernière épreuve, ma chère et tendre sœur, pour toi. Mes maux paraissent être à leur comble ; ils vont vraisemblablement finir; prépare ma malheureuse maman à lire cette lettre fatale et dites l'une et l'autre que je ne serai plus lorsque vous la recevrez.
Je ne m'attendais pas, ma chère maman, de dater ma lettre d'Étampes ; on a voulu absolument nous mener à Paris. J'ai demandé l'agrément de pouvoir vous écrire encore une fois ; je ne vous cache pas que je suis bien persuadé que vous n'en recevrez jamais d'autre de ma main. Ma plus grande peine est de vous laisser en proie à une douleur éternelle ; pour ce qui me regarde, j'ai fait le sacrifice de ma vie en rapportant toutes mes pensées à Dieu. Si quelque chose peut adoucir ma position, c'est de savoir que je n'avais point mérité ma destinée, de connaître mon innocence. Puisse-t-elle faire votre consolation ! C'est le dernier vœu que je forme. Sarrante est resté à Orléans. Mes malheurs le ramèneront auprès de vous. Sa conduite auprès de moi est inimitable, ses bienfaits seront gravés dans mon cœur tant que je respirerai, vous vous en rappellerez également; je suis forcé de céder ma plume à mes camarades d'infortune, pour jouir de cette dernière douceur. Adieu, ma très-chère sœur et trop sensible mère, que de pleurs ne verserez-vous pas dans toute votre vie !
Nous arriverons dimanche à Paris.